ais chier ! » Elle donna un violent coup de pied dans la poubelle vide de son bureau tout en poussant un cri de rage. Elle agissait toujours de cette manière lorsqu’elle était face à une impasse et elle savait qu’elle aurait dû réagir autrement, mais elle n’y parvenait pas. Annoncer à un couple qu’elle ne pourrait rien faire pour leur enfant était une chose qui la révulsait et qu’elle détestait faire, malheureusement cela faisait également parti de son métier et elle ne pouvait y réchapper. Sa colère était sa manière d’accepter les choses et c’était toujours mieux que de se mettre à pleurer. Car ayant elle-même perdu sa fille d’une maladie incurable, elle ne pouvait que comprendre la douleur que tous ces parents devaient ressentir. Si seulement elle avait pu tous les sauver, ça aurait été tellement plus simple… « Kate, ça va ? » Une de ses collègues venait de passer sa tête par l’embrasure de la porte de son bureau, ayant entendu le fracas de la poubelle lorsqu’elle avait heurté le sol. « Oui, ça va, merci Deborah. » Elle la congédia d’un geste de la main et cette dernière s’éclipsa sans poser plus de questions. De toute façon, tout le monde ici était au courant de ses violentes réactions lorsqu’elle devait faire face à un échec, même s’ils ne connaissaient pas la raison exacte. Elle n’avait jamais parlé à personne de Kally et elle ne comptait pas le faire de sitôt. C’était sa douleur, ses cicatrices et elle estimait que les gens n’avaient pas besoin de savoir. Inspirant profondément, elle tacha de reprendre son calme et de remettre un peu d’ordre dans son bureau avant l’arrivée de sa patiente suivante. Au moins pour celle-ci les choses étaient plus positives et Katerina allait pouvoir faire quelque chose. Sortant de son bureau, elle marcha jusqu’à la salle d’attente où l’attendait une jeune femme qui avait tout juste plus que la vingtaine et qui se leva en l’apercevant, un sourire aux lèvres. « Docteur Wilkerson. » Kate lui serra la main tout en souriant à son tour. « Bonjour Ana, comment allez-vous depuis la dernière fois ? » La future maman lui répondit que tout allait bien, ce qui rassura quelque peu la chirurgienne. Elle avait eu peur que l’état de l’enfant affecte rapidement celui de sa mère mais pour le moment ça avait l’air d’aller. Elle s’apprêtait à faire demi-tour lorsqu’elle remarqua la jolie blonde qui se tenait debout derrière la patiente et Kate s’arrêta quelques secondes pour la regarder. Dotée d’une longue crinière blonde, d’un regard bleu envoûtant et de lèvres pulpeuses, elle était vraiment très belle et plutôt sexy. Vraiment sexy en fait. Mais Kate s’arracha rapidement à la contemplation de cette douce créature pour prendre la direction de son bureau, les deux jeunes femmes sur les talons. Une fois à l’intérieur, la chirurgienne fit allonger sa patiente sur sa table d’auscultation et, après s’être installée près d’elle, elle appliqua un gel sur son ventre et se saisit de l’échographe qui se trouvait derrière elle. Rapidement l’image du fœtus apparut à l’écran et le son régulier des battements du cœur se fit entendre, arrachant un sourire à Kate. « Okey, on va regarder ça. » En regardant l’échographie, on pouvait facile remarquer une masse sombre sur le flanc droit du fœtus, qui n’était rien d’autre qu’un tératome d’une taille assez importante. Néanmoins, et c’était plutôt rassurant, celui-ci ne semblait pas avoir grossi depuis la dernière fois que Kate avait vu sa patiente. Cette dernière était dans sa trentième semaine de grossesse et la chirurgienne avait l’intention de la faire aller le plus loin possible, tant que le fœtus ne présentait pas de signe de faiblesse. Car le jour où elle l’opérerait, si jamais cela se passait mal et qu’elle devait sortir le bébé, il était préférable que celui-ci ait passé le plus de temps possible dans l’utérus de sa mère. Sans rien dire sur le moment, elle se releva et laissa la future maman essuyer son ventre, puis venir s’asseoir dans l’un des sièges face à son bureau. Durant tout ce temps, la jeune blonde qui l’accompagnait était restée en retrait et Kate ne se rappela sa présence que lorsqu’elle croisa son regard. S’installant ensuite dans son fauteuil, elle commença à converser avec sa patiente. « Bien, pour le moment l’état de votre bébé est stable. Mais ce genre de tératome peut grossir très rapidement et j’aimerais bien vous revoir chaque semaine jusqu’au moment où je jugerai que je dois opérer. » La future maman hocha la tête et posa quelques questions, auxquelles Kate tenta de répondre le plus clairement possible, tout en tachant de la rassurer. C’était l’un des aspects les plus difficiles de sa profession : rassurer les parents et faire en sorte qu’il lui fasse confiance. Car même si elle était encore jeune dans le métier, elle s’était révélée assez brillante jusqu’ici et elle ne doutait pas de ses capacités. De temps à autre, elle jetait des coups d’œil à la jolie blonde qui s’était assise elle aussi mais qui ne disait toujours rien, écoutant ce qui se disait. Finalement, lorsque plus aucune question ne fut posée, Kate se releva et serra la main de sa patiente tandis qu’elle la raccompagnait jusqu’à la porte. Mais alors que celle-ci sortait, la jeune blonde resta dans la pièce, ce qui intrigua la chirurgienne qui se tourna vers elle pour vraiment prendre le temps de la regarder cette fois-ci. « Oui ? »

a matinée venait de toucher à sa fin lorsque sa patiente sortit de son cabinet et la jeune femme s’apprêtait à rentrer chez elle pour profiter de la pause méridienne qui lui était accordée, mais la jeune blonde qui accompagnait la future maman ne quitta pas la pièce et resta là, à la regarder pendant de longues minutes, sans rien dire, laissant un silence pesant s’installer entre les deux jeunes femmes. Katerina avait arrêté de faire ce qu’elle faisait, c’est-à-dire mettre de l’ordre sur son bureau, et fixait la demoiselle qui se trouvait face à elle. Que voulait-elle exactement ? Avait-elle des questions à lui poser concernant son amie ? La chirurgienne serait ravie d’y répondre si jamais c’était le cas, mais visiblement ça ne semblait pas être ça. Sa présence l’intriguait fortement. Passant devant son bureau, elle s’assit sur le coin de celui-ci, croisant ses bras sur sa poitrine, un mince sourire aux lèvres, attendant que la jolie blonde prenne la parole. Finalement, au bout d’un certain temps, c’est ce qu’elle fit, mal assurée et hésitante cependant. Et en même temps… il y avait de quoi hésiter au vu de ce qu’elle venait de dire. Ses paroles étonnèrent fortement Kate mais elle ne le montra pas et continua de la regarder sans se départir de son mince sourire. Elle avait du cran cette gamine, de lui dire qu’elle était restée car elle était tombée sous le charme de ses yeux bleus. Cela amusait la jeune femme, cependant elle n’avait aucune idée de ce qu’elle pouvait bien répondre à ça. La rembarrer ? Hum, ça aurait été se mentir à soi-même car il fallait bien avouer qu’elle aussi, elle avait remarqué la blondinette dès l’instant où elle l’avait vue. Mais elle ne pouvait pas non plus l’encourager dans cette voie, si ? On ne l’avait jamais abordé de manière aussi directe et, au cours des dernières années, elle avait repoussé toutes les personnes qui avaient tenté de l’approcher, s’entourant d’une solide carapace presque infranchissable. C’est la morte de Kally qui l’avait rendue si froide et distante, et elle ne s’était pas autorisée à ouvrir son cœur depuis ce jour. Et là maintenant qu’on s’intéressait à elle… Elle était complètement désarmée. Mais cela faisait tellement longtemps qu’elle avait perdu son bébé, elle n’allait pas s’interdire de vivre toute sa vie simplement par peur de souffrir, n’est-ce pas ? Pourtant sa réaction se montra très contradictoire avec sa pensée et elle balaya les propos de la jeune blonde d’un geste de la main. « C’est adorable de votre part et ça me touche, mais… Je suis désolée, je ne suis pas intéressée. » Menteuse. Elle se mordit légèrement la lèvre, enroulant une mèche de ses cheveux autour de ses doigts. Pourquoi avait-elle dit ça ? Idiote. Elle lut de la déception sur le visage de la jolie demoiselle et elle regretta de lui avoir répondu qu’elle n’était pas intéressée. Elle était belle comme un cœur, dégageait un charme fou et était tout à fait aux goûts de Kate. Pourquoi fallait-il toujours que la peur la paralyse ? Elle avait l’impression à cet instant d’être un lapin pris au piège dans les phares d’une voiture, incapable de réfléchir et de faire quoi que ce soit. La blondinette était sur le point de quitter la pièce et la chirurgienne savait qu’elle allait le regretter si elle la laissait partir sans rien faire. Mais comment la rattraper alors qu’elle venait de la repousser il y a tout juste quelques minutes ? Agissant par instinct, elle se dirigea d’un pas décidé vers elle et posa une main sur la porte pour l’empêcher de sortir, tandis que l’autre se posait délicatement sur sa joue pour tourner son joli visage vers elle. Son regard croisa le sien, lui donnant la force de faire ce qu’elle avait envie de faire depuis le moment où elle avait posé ses yeux sur elle, dans sa salle d’attente. Ses lèvres vinrent se poser en douceur sur les siennes, les scellant dans un tendre baiser, qui ne dura cependant que quelques secondes avant que la jeune femme ne recule, elle-même stupéfaite par l’audace dont elle venait de faire preuve. Ses joues se colorèrent de rose lorsqu’elle se rendit compte de ce qu’elle venait de faire et elle passa une main dans sa crinière blonde, un sourire gêné aux lèvres. « Pardon, je, hum… » Elle ne savait plus quoi dire et elle resta simplement sans rien faire, baissant la tête en se mordillant de nouveau la lèvre, espérant que la jeune femme n’allait pas prendre mal ce baiser. Mais après tout, elle lui avait dit qu’elle était tombée sous le charme de son regard, alors ça ne devrait pas la déranger plus que ça, n’est-ce pas ? En tout cas, Kate l’espérait du plus profond de son être.